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avril 15, 2020

Le fiasco de Donald Trump face à la pandémie : une occasion ratée

Pour un homme égocentrique, narcissique et assoiffé de pouvoir qui désire être reconnu comme l’un des plus grands présidents des États-Unis, en tentant désespérément de se faire réélire, Donald Trump a lamentablement échoué à se montrer à la hauteur de la situation provoquée par l’apparition et la propagation regrettables du coronavirus. Au lieu de minimiser les risques alarmants du coronavirus et d’ignorer les mises en garde d’éminents scientifiques contre les conséquences désastreuses que ce virus pourrait entraîner, le président américain aurait pu mobiliser toutes les ressources nationales dès le début de cette pandémie pour attaquer ce problème de front. Il aurait ainsi pu faire appel à l’armée, à la garde nationale des États-Unis, ainsi qu’à des milliers d’entreprises et d’établissements médicaux pour produire le matériel essentiel et réaliser des tests à l’échelle nationale, et mettre au point un programme national offensif pour combattre ce virus sur tous les fronts.

S’il avait agi de la sorte, il aurait pu obtenir à peu près tout ce qu’il désirait. En fait, il aurait pu sortir de cette pandémie tragique en héros. Le public lui aurait pardonné ses mensonges incessants, ses déclarations délibérément trompeuses, ses idiosyncrasies et ses actes de corruption. Je crois aussi que Donald Trump aurait été capable de battre à lui seul n’importe quel candidat démocrate éventuel, y compris Joe Biden, en novembre.

La question est de savoir pourquoi Donald Trump n’a pas suivi cette logique. Plusieurs raisons expliquent ce comportement étrange, mais aucune n’aurait dû occulter la gravité de la situation – si seulement il n’était pas si imbu de lui-même. De son point de vue, tout commence, d’abord et avant tout, par ce qui peut servir ses intérêts personnels.

Dès le début, Donald Trump a cherché à se dissocier de l’émergence du virus : il a nié avoir négligé de préparer le pays à une telle épidémie, alors qu’il a fortement contribué à son manque de préparation. Au printemps 2018, il a dissous l’équipe chargée de la lutte contre les pandémies, en licenciant notamment le contre-amiral Timothy Ziemer, qui en était le responsable. En outre, il a sabré le financement des Centres pour le contrôle et la prévention des maladies et il continue de faire pression en vue de réduire le financement américain de l’Organisation mondiale de la santé. Il semble, par ailleurs, réticent à effectuer des tests dans l’ensemble du pays, car il refuse de montrer que le nombre de personnes contaminées augmente de façon exponentielle, laissant le pays plus vulnérable qu’il ne l’a jamais été.

Donald Trump s’est soucié, avant toute chose, de l’économie. Ayant fondé sa campagne de réélection sur la poursuite de l’essor économique, il a rejeté tout ce qui pouvait nuire à la santé de l’économie. C’est la raison pour laquelle il en est venu à minimiser les conséquences désastreuses du coronavirus, quand bien même il était déjà au courant du virus au début du mois de janvier. Il a rejeté les preuves scientifiques qui indiquaient que les répercussions seraient catastrophiques si le pays n’était pas totalement mobilisé pour lutter contre l’épidémie.

Comme à son habitude, Donald Trump n’assume jamais la responsabilité d’une situation qui s’envenime, mais il se précipite et prend plaisir à s’attribuer le mérite de tout élément positif, réel ou apparent, comme le record du marché boursier ou le taux de chômage le plus bas depuis une trentaine d’années qui, en réalité, résulte en grande partie des plans de relance économique de Barack Obama. Dans le cas présent, Donald Trump attribue clairement la faute du manque de fournitures médicales essentielles à l’administration Obama ainsi qu’à différents gouverneurs qui se retrouvent à devoir gérer seuls cette situation. Il les accuse, car c’est plus pratique et parce que cela lui permet de se démarquer des « échecs » de ses prédécesseurs qu’il déteste profondément.

Il est totalement absorbé par sa campagne de réélection, et c’est peu de le dire. Rien d’autre n’a d’importance à ses yeux. Il était déterminé à considérer le Covid-19 comme une distraction supplémentaire et à ne pas laisser la propagation rapide du virus interférer dans ses efforts de réélection. Ayant finalement pris conscience de la gravité de la pandémie, le nombre de morts et de personnes contaminées augmentant de façon exponentielle, Donald Trump a rapidement su tirer parti de cette situation en tenant une conférence de presse quotidienne, qui remplace ses meetings de campagne.

Enfin, il s’est empressé de s’attribuer tout le mérite de l’adoption du plus grand plan de relance économique, à raison de 2 200 milliards de dollars. Ce plan de relance est essentiel pour maintenir le taux de chômage – qui a explosé ces dernières semaines – aussi bas que possible et permettre au marché boursier de regagner une partie de ses pertes considérables. À l’évidence, Donald Trump veut se présenter comme le sauveur de l’économie ; il sait qu’à moins d’une amélioration significative des perspectives économiques dans un avenir proche, ses chances d’être réélu ne seront pas très prometteuses.

Pendant que Donald Trump se concentrait sur ses intérêts personnels, le coronavirus a coûté la vie à des dizaines de milliers d’Américains et contaminé des centaines de milliers d’autres (14 696 décès et 427 460 cas à l’heure où j’écris ces lignes). Une grande partie de cette tragédie aurait pu être évitée si son administration avait été mieux préparée et si Trump avait lui-même agi de bonne foi. Il a préféré mettre en avant des produits pharmaceutiques non prouvés et sous-testés dans l’espoir qu’ils se révèlent bénéfiques, afin de pouvoir présenter cette démarche à ses citoyens comme un autre signe de sa grande réussite dans la gestion de la pandémie.

Le problème avec Donald Trump, c’est son obsession de lui-même, qui l’empêche d’avoir une vision globale des choses. C’est à cause de son ignorance qu’il ne s’est pas rendu compte qu’une crise pouvait déboucher sur des avancées. S’il s’était montré honnête avec lui-même et avec les citoyens américains, il aurait simplement pu admettre que le pays n’était pas préparé à ce type de situation et qu’il combattrait ce virus mortel avec toute la puissance de l’Amérique. Il aurait aussi pu offrir de l’aide à d’autres pays dans le besoin et restaurer ainsi la primauté mondiale des États-Unis, du moins en partie.

Le fait de prendre ses responsabilités et de se montrer à la hauteur de la situation en redressant les torts causés aurait en effet permis à Donald Trump d’apparaître sous un tout autre jour. Il aurait pu sortir de cette pandémie historique en dirigeant incontestable, visionnaire et résolu – des qualités qui ne lui ont échappé que lorsqu’elles étaient à sa portée.

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