Cinquante ans d’occupation immorale
Ce 5 juin 2017, voici tout juste cinquante ans qu’Israël occupe les territoires cisjordaniens ; un cap dont on se souviendra honteusement.
Cinquante ans de déshumanisation, aussi bien pour l’occupant que pour l’occupé ; des années sans trouver le courage de réparer les torts causés.
Cinquante ans qui n’ont rien entraîné d’autre que haine et mépris de l’autre ; des années d’illusions dépensées inutilement en essayant de refuser à l’autre le droit de créer son propre État.
Cinquante ans d’aspirations à la paix, anéanties encore et encore ; des années de soumission au désespoir et à la désolation.
Cinquante ans de pessimisme, de paralysie et d’abandon total de ses responsabilités ; des années perdues, peur de saisir la seule et unique solution, préférant entretenir ce fantasme.
Cinquante ans d’hypocrisie vis-à-vis de l’autre pour une paix des plus louables ; des années de victimisation mutuelle et de réconfort dans l’apitoiement et les rêves volés.
Cinquante ans d’une occupation dépassant les limites de la décence humaine, soumettant les Palestiniens au découragement et au désespoir ; des années de colonisation, de démolitions de foyers, de raids nocturnes terrifiants, de déracinement d’oliviers ; des années d’usurpation des territoires palestiniens, privant ce peuple de son rêve de liberté et d’indépendance.
Cinquante ans de douleur et d’angoisse, qui n’ont épargné que très peu de personnes ; craignant, jour après jour, l’incarcération ou la détention administrative, avec des milliers de prisonniers politiques croupissant en prison ; des années de privation de droits fondamentaux, sans savoir avec certitude ce que réserve l’avenir ; des années d’indignation pour ces jeunes Palestiniens, nés et élevés sous cette occupation, sans espoir et sans perspective de libération, entravés par des chaines de déshonneur et de désespoir.
Depuis cinquante ans, Israël refuse aux Palestiniens leur droit à disposer d’eux-mêmes, justifiant son action au nom de la sécurité nationale. Et pourtant, rien ne menace plus sa sécurité que cette mainmise continue. Le fait de violer la loi morale et de bafouer les droits de l’homme des Palestiniens ne peut que favoriser l’émergence d’une nouvelle génération qui vit la rage au cœur, éprouvant sans cesse de la rancune et désirant uniquement nuire aux Israéliens, puisqu’il ne lui reste plus rien à perdre.
Pour de nombreux Israéliens, ces cinquante années d’occupation semblent s’être écoulées comme si de rien n’était. Ils se sont habitués à ces conditions de vie, qu’importe que l’érosion morale ait contaminé leur tissu social, faisant fi du principe éthique sur lequel l’État même a été érigé.
Ils se sont laissé influencer par des dirigeants corrompus sans trouver le courage d’assumer leurs convictions et de changer de direction, s’exemptant eux-mêmes de l’obligation morale d’être justes et équitables. Ils sont devenus indifférents et suffisants, fermant les yeux sur la réalité, ne se préoccupant guère de ce qu’il adviendra d’Israël dans dix ou quinze ans s’ils ne mettent pas à un terme à cette occupation inhumaine.
Israël a passé cinquante années à préparer ses jeunes au prochain combat violent, leur injectant dans les veines le poison de la haine, leur apprenant à considérer les Palestiniens comme des objets qui peuvent être dépouillés sans aucun sentiment de culpabilité morale.
Pour se libérer de ce joug, les Palestiniens doivent faire leur part. Ces années d’égarement, de division, d’extrémisme, guidés par cette détermination de détruire Israël, tout en incitant le peuple à la violence, n’étaient rien d’autre que contreproductives.
Rongés par le factionnalisme et les rivalités aveugles, les Palestiniens ont raté, les unes après les autres, toutes les occasions de rétablir la paix, préférant livrer désespérément des guerres perdues d’avance. Brisés, ils s’accrochent à cette illusion qu’ils peuvent l’emporter.
Les dirigeants palestiniens ont passé cinquante ans à gaspiller les ressources de leur peuple pour en tirer des profits personnels, préservant leur pouvoir aux dépens des pauvres et des abattus. Ils ont persécuté les générations les unes après les autres, les privant d’un avenir prometteur, les aliénant et les laissant languir dans l’abîme de leur désespoir, au lieu de défier les Israéliens en construisant un pays libre, indépendant et prospère dont ils seraient fiers.
Quand tout cela s’arrêtera-t-il ? Combien d’enfants doivent-ils encore mourir pour un objectif insaisissable qui défie la réalité et le bon sens ? Ces Israéliens et Palestiniens qui croient en un destin partagé doivent désormais refuser de coopérer avec des dirigeants corrompus, insensibles à l’ampleur des conséquences si la situation ne change pas.
Les dirigeants israéliens doivent mettre un terme à cette occupation et cesser de se délecter de leurs mensonges. Il est grand temps de reconnaître que l’occupation est un obstacle insurmontable qui étouffe doucement les Israéliens, vidant la sève de leur esprit, corrompant leur âme et dépouillant Israël et les juifs du monde entier de leurs valeurs cardinales : justice, bonté et bienveillance, les piliers de leur survie même.
J’en appelle à tous les hommes et toutes les femmes de conscience pour mettre un terme à la folie de ce conflit affligeant. Aucun enfant israélien ou palestinien ne devrait plus perdre la vie dans un autre conflit violent entre ces deux camps, qui n’apporterait absolument rien d’autre que souffrance, découragement, chagrin et de nouvelles effusions de sang.
Ainsi que l’a dit feu le président Kennedy dans les années 1960, « le peuple attend autre chose de nous que des cris d’indignation et des attaques. Les temps sont trop graves, les défis trop urgents et les enjeux trop élevés… »
Il est temps pour ces deux peuples de se lever et d’exiger de leurs dirigeants qu’ils parviennent à un compromis et qu’ils acceptent une réalité que personne ne pourra changer. Il est temps de trouver une solution juste et équitable qui mettra fin à l’occupation israélienne des territoires palestiniens.
Si Israéliens et Palestiniens continuent de se haïr, de s’en vouloir et de s’entretuer, ils finiront consumés par ce territoire pour lequel ils se battent. Mais s’ils apprennent à vivre dans l’harmonie et la paix, ensemble ils en feront un pays de cocagne et ouvriront la voie à une renaissance comme il ne s’en est jamais vu.